Des avancées décisives

Sous l’égide de la fondation de France et de la fondation CNP, le Centre national de ressources contre la douleur publie les résultats de l’enquête épidémiologique concernant les gestes douloureux prodigués sur les nouveau-nés en pédiatrie. Quand efficacité des soins rime avec sensibilité.

LONGTEMPS ignorée des acteurs de santé, la douleur provoquée par les soins en pédiatrie est l’objet de toutes les préoccupations médicales Alors que la première journée du Cnrd (Centre national de ressources contre la douleur, hôpital Trousseau, Paris) se tenait à l’institut Pasteur le 17 octobre, ce même organisme, parrainé par la Fondation de France et la Fondation CNP, rendait publics les résultats d’une enquête épidémiologique sans précédents l’étude Epippain, sur la prévention de la douleur chez le nouveau-né.

<< Plus l’enfant est immature, plus il est fragile et réagit vivement à des gestes invasifs, explique Ricardo Carbajal, véritable Monsieur Plus de la douleur depuis les premières expertises qu’il a dirigées en 1998-1999 au CH de Poissy – Saint-Germain-en-Laye. Il y a quinze ans, on opérait encore des nourrissons du thorax sans 1’anesthésie adéquate. Comment les traitements analgésiques sont appliqués sur le terrain au jour le jour ? >>

Les conclusions de l’enquête Epippain (Epidemiology of Procedural Pain In Neonates) visent à définir des stratégies optimales pour limiter l’expérience douloureuse chez l’enfant tout en conservant la même qualité de soin.

Entre septembre 2005 et janvier 2006, 700 cadres de santé ont donc observé les conduites et le comportement de 431 nouveau-nés âgés de 6 mois et demi à 7 mois dans 13 centres associés – pour l’essentiel, des services de réanimation, notamment ceux du Kremlin-Bicêtre et de Necker (Paris).

Près de 100 ponctions au talon. Jusqu’alors, aucune étude scientifique sur la fréquence des gestes douloureux n’avait été publiée.
Et pour cause:
pendant la durée de l’étude (huit jours) 60 975 gestes douloureux ou inconfortables ont été corrigés.
Parmi ceux répertoriés plusieurs reviennent sans cesse :
La pose de sondes gastriques, le décollage de divers adhésifs, 1’aspiration trachéale et les ponctions au talon, << répétées pour un quart des enfants plus de 30 fois et, pour l’un d’eux jusqu’à 95 fois sur une zone qui ne doit pas faire plus de 2 centimètres >>, précise encore R. Carbajal. Ces gestes sont donc monnaie courante, particulièrement chez les prématurés, chez lesquels la baisse du taux de sucre dans le sang peut entraîner des lésions neurologiques.

Dans ses grandes lignes, l’étude atteste d’une vraie attention portée aux traitements analgésiques pour les gestes très douloureux tout en admettant que des progrès restent à faire pour ceux qui font modérément souffrir comme les ponctions.

En outre, les analgésiques sont aujourd’hui bien connus du personnel hospitalier, qui n’hésite pas à y avoir recours. On associe souvent la morphine ou la crème anesthésiante Emla à des moyens non médicaux – l’allaitement maternel, le contact peau contre peau -, mettant à profit l’effet analgésique de la contre-stimulation.
<>, conclut R. Carbajal.

Mais pourront-elles seulement être corrigées ? L’expérience du réseau SOS douleur monté il y a cinq ans à Angoulême (Charente) pour prendre en charge des patients souffrant d’ artérite est un modèle à suivre. Ce système a permis une diminution significative des séjours hospitaliers – << de 40 à 80 % selon les pathologies >>, précise Eric Bures, le responsable du réseau – et de 35 % des complications constatées, notamment les amputations. Malheureusement, << il n’existe pas de nomenclature des actes de soins prodigués par les infirmières. Les gestes ne sont pas remboursés par la caisses d’assurance-maladie >>, regrette E. Bures.

La mutualisation de cette expérience semble mal partie. Une impasse définitive ?

Renseignements: www.cnrd.fr:
LE QUOTIDIEN DU MEDECIN – N°8034 – VENDREDI 20 0CT0BRE 2006 – www.quotimed.com